Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/81

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livresque : elle avait taillé son expérience à même la vie. Et à quel prix ?

Dans un appel à la jeunesse paysanne à ne pas déserter la campagne, elle lançait à tous vents le cri d’un cœur ardent dont l’accent ne trompe pas ; une longue plainte qui déchire l’air et qui, longtemps après qu’elle s’est tue, prolonge son écho dans les âmes, ainsi que les coquillages gardent enclos dans leur spirale de nacre le bruit de la mer.

« Si tu ne veux pas connaître, ô jeunesse, fleur de la paysannerie, l’abandon de toute fierté et la honte de mendier un quignon de pain, quand le blé blondit à plein champ chez vous, reste sur la terre ».

Elle continuait sur ce ton en un cruel réveil, dans l’unique espoir de mettre en garde les jeunesses terriennes contre l’attirance des villes, elle montrait les blessures à vif que son cœur avait reçues.

L’aube pointa, le jour parut et bientôt le soleil glissa dans la chambre. Caroline écrivait toujours. Elle ne sentait ni le froid, ni la faim, ni ses larmes ruisselan-