Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/88

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à soi, avec titres et sous-titres en caractères gras, la nouvelle écrite qu’on pourrait gruger du regard à toute heure. Même à l’approche de Noël, fête d’amour, la formule primitive ; « Œil pour œil, dent pour dent » régnait toujours.

Peu enchantée de l’accueil tiède que Caroline accordait à la nouvelle, la commère minauda méchamment :

— Sans doute que vous avez vos préférés ?

— Tout le monde ici est traité sur le même pied, trancha Caroline.

— Alors, c’est drôle que depuis quelque temps on voit toujours le nom des mêmes dames dans la colonne des déplacements.

— Madame, c’est parce qu’elles donnent la peine de nous apporter une note.

— Et moi, est-ce que je ne vous apporte pas une note aujourd’hui ?

La conversation devenait insoutenable Caroline décidée à ne pas passer la nouvelle se demandait comment manœuvrer de manière à ce que la femme se déleste pour le moment du moins de ses mauvaises intentions, tout en n’encourant pas sa rancune.

Par l’entrebâillement de la porte, Lauréat l’appelait par signes. Il avait tiré une épreuve de titres en capitales avec les caractères gothiques ; seulement parmi ses vœux, elle ne pourrait se servir de la lettre P que deux fois et il ne fallait pas songer à se procurer d’autres caractères aussi démodés.

Lauréat qui entendait à rire suggéra à Caroline, d’un air innocent, d’écrire rien qu’une phrase : « Mettez la paix dans nos familles ! »

Quand, ils eurent fini de parlementer,