Page:Guèvremont - Tu seras journaliste, feuilleton paru dans Paysana, 1939-1940.djvu/9

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offrait des fruits avec force œillades et un brin de marivaudage, dans l’espoir d’attendrir la clientèle. Caroline n’en fit pas de cas : elle avait pris rendez-vous avec l’éternité.


CHAPITRE II


Jamais elle n’aurait cru qu’il fut si facile de mourir. Son pouls était normal ; elle tendait de tout son être vers l’au-delà. Non, le visage de la mort n’en est pas un qui grimace : c’est le visage d’une amie. Et dire que des mourants n’arrivaient pas à faire le sacrifice de leur vie, qu’ils suppliaient le Tout-Miséricordieux de leur accorder la grâce de souffrir encore et qu’elle, jeune et forte, dénouerait de son gré les entraves qui la liaient à la terre. Dans son cœur, elle pria Dieu, en échange de sa vie, de conserver l’existence à une femme heureuse.

Déjà l’eau, en débordant, avait éteint le gaz. Le fluide, libre, filtrait de l’étoile de fer.