Page:Guérin - Journal, lettres et poèmes, 1864, 6e éd.djvu/449

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vers leur destinée et que son esprit se joignait à leur cours. La marche de Plexaure se plongea dans les forêts les plus déployées. Quand une océanide est touchée de sommeil, tandis qu’elle parcourt les mers, ses membres s’affaissent et prennent leur couche sur les flots ; elle a résigné la conduite de son voyage à l’inconstance des ondes. Flottante, on dirait de loin un mortel expiré ; mais dans la vague qui l’emporte, elle est étendue avec la légèreté de la vie et son sein use d’un sommeil inspiré par l’Océan. Tel paraissait le repos de Plexaure dans le lit des forêts. Arrêtée sur le bord des descentes profondes, Telesto s’inclinait tenant ses bras étendus vers les vallées, pareille à Cérès, au sommet de l’Etna, quand la déesse, s’avançant sur l’ouverture du cratère, allume sa torche de pin dans le feu du volcan.

Pour moi, qui ignorais encore le dieu, je courais en désordre dans les campagnes, emportant dans ma fuite un serpent qui ne pouvait être reconnu de la main, mais dont je me sentais parcourue tout entière. Semblable à un rayon de soleil, conduit en replis autour d’un mortel par la puissance des dieux, ses nœuds m’enlaçaient d’une chaleur subtile qui irritait mes esprits et chassait mes pas comme un aiguillon. J’allais accusant Bacchus et songeant aux flots de la mer où je me croyais contrainte ; mais le dieu eut dans peu de temps épuisé mes pas. Inclinée vers la chute, j’implorai la terre qui donne le repos, quand le serpent, redoublant ses nœuds, attacha dans