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Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/200

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Et le Nabi, les bras croisés sur sa poitrine,
Dit : — Bèn-Hadad, ton roi guérira dans son lit. -—
Puis de ses yeux profonds, au long de sa narine,
Comme une source, un pleur inattendu jaillit.

Et sous les sourcils blancs, son regard, comme un glaive
Inévitable, entrant dans le cœur d’Hazaël,
Elischâ dit : — J’ai vu ! Le jour sanglant se lève !
Le jour du meurtre luit à l’horizon du ciel !

Bouches, hurlez ! Saignez, ô chairs ! Coulez, ô larmes !
Car j’entends tes guerriers, Serviteur de ton roi !
Fouler le sol conquis et trancher de leurs armes
La moisson de douleur qui se lève après toi.

Le mur de Dammeseq est comme une chaudière
D’où le torrent de feu ruissellera sur nous !
O villes d’Israël ! ô palais ! ô poussière !
O vierges de Schomron, dont les bras étaient doux !

Car toi-même, Hazaël ! roi sur la terre immense
Où Dammeseq repose au bord des fraîches eaux,
Bourreau de Bèn-Hadad ! Voici qu’en sa démence
Ta haine aiguisera les dents des lionceaux.

Le peuple d’Israël sera, sous tes étreintes,
Comme un captif vieilli sous la meule écrasé ;
Et du ventre béant de ses femmes enceintes
Le sang noir coulera comme un vin transvasé ! —