Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/101

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Et vers d’autres butins, prompte et comme enhardie,
La horde ne laissait pour les derniers venus
Qu’un désert éternel de cendre refroidie.

Pleurez ! Pleurez les jours que vous avez connus,
Femmes ! Les plaques d’or et les parures neuves
N’orneront plus l’orgueil de vos larges seins nus.

Tranchez vos blonds cheveux, comme il sied à des veuves,
Épouses des Héros qu’un fils n’a point vengés !
L’ombre errante des morts clame dans les épreuves. —

Telles, armant leurs cœurs, du souvenir rongés,
Sans larmes, le front haut, les Galates entre elles
Évoquaient vos esprits, ô guerriers égorgés !

Un suprême dédain assombrit leurs prunelles ;
Et nul n’insultera d’un geste ou d’un regard
Leur fierté prisonnière au lit des vainqueurs frêles.

Le long du Kaïkos elles vont. A l’écart,
L’eunuque, embarrassé dans sa robe de soie,
D’un œil trouble et pesant suit le troupeau hagard.

Mais soudain s’élançant avec un cri de joie,
Les captives ensemble ont franchi d’un seul bond
Le bord du Kaïkos qui s’entr’ouvre et tournoie.