Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/86

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Et seuls, debout au faîte éblouissant du trône,
Les Adelphes royaux, dans une clarté jaune,
Groupe d’airain frappé par un rayon vibrant,
Resplendissaient en cor sur le soleil mourant.

Mais voici ; bondissant au travers de la foule,
Un messager rapide accourt. La sueur coule
Sur ses membres ; ses pieds rougissent le pavé ;
Un souille rauque échappe à son sein soulevé ;
Il chancelle ; l’horreur étreint sa gorge rude,
Et dans le soir farouche et plein d’inquiétude,
Sa voix en défaillant jette un effroi divin :

— O Maîtres, le premier de tous (car il est vain
De celer aux grands Dieux le cours secret des choses),
Je ferai devant vous s’ouvrir mes lèvres closes,
Et messager funèbre, hélas ! j’annoncerai
L’irrémissible crime et le forfait sacré.
Hélas ! Hélas ! quels mots terribles te dirai-je,
Reine ! et de quels discours peindre le sacrilège ?
Sachez-le cependant, ô Rois ! et pardonnez
À l’esclave.

                        Selon les rites ordonnés,
Le Prêtre, chef du temple, avait, d’un bras robuste,
De la barre d’airain fermé la porte auguste,
A l'heure où, désertant le ciel occidental,
La Barque d'or sombrait dans l’Amenti natal.
Le nocturne gardien, dès la première veille,