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Page:Guimet - Promenades japonaises, 1880.djvu/164

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son tenogoui, arrangé en couronne, lui faisaient comme une aigrette sur le front ; une canne de bambou, posée sur sa nuque, supportait gracieusement ses deux bras dont les manches tombantes, agitées par la marche, formaient comme deux ailes.

— Écoutez, s’écria Mmégaé s’adressant à ses compagnons, je connais cette chanson, Korétoki la chantait bien souvent. Je vous en prie, Obana, interrogez ce garçon, il peut nous donner d’utiles renseignements sur la personne que nous sommes venus chercher.

En effet, l’enfant était un domestique de Korétoki. Il se promenait dans les sentiers du parc sacré en attendant que son maître, qui était venu implorer pour sa mère malade le dieu Hatchiman, eût terminé ses dévotions.

Korétoki, lui-même, ne tarda pas à paraître. Mais, quels que fussent son étonnement et sa joie de trouver là son amante et ses amis, il ne laissa voir aucune émotion, car il savait vivre et connaissait les convenances. Il conduisit, dans une attitude respectueuse, Mmégaé jusqu’à une salle du temple, la fit asseoir à la place d’honneur, en face de la porte d’entrée, plaça, aux côtés de sa maîtresse, Obana à droite, Matsoué à gauche, et, s’inclinant devant son amante, il se mit à frotter ses tibias avec les mains, ce qui est le comble de la déférence.

Puis, prenant la parole, il pria la jeune fille d’agréer l’assurance de ses sentiments distingués, et la félicita sur sa bonne santé.

Mmégaé rougit, baissa la tête, leva sa manche et ne répondit pas, ce qui était, remarquons-le, contraire aux rites.

Alors le jeune homme s’adressa à Obana et apprit de lui toute l’aventure.

Il fut convenu que les voyageurs seraient conduits chez les parents de Korétoki, où ils seraient présentés comme des connaissances de Kioto, et qu’on aurait soin de cacher la haute naissance de Mmégaé.