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Page:Guinault - Le numéro treize (1880).pdf/11

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LE PETIT VILLAGEOIS

Leste, je me hissais de botte en botte jusqu’au faîte, puis, mollement étendu, je faisais mon entrée dans le village, riant à la mère qui criait en m’apercevant :

— Eh ! petiot, prends garde… tu vas tomber, mon enfant !

Avec les différentes saisons, les plaisirs variaient. Au printemps, mes camarades et moi nous allions chercher des nids, car nous ignorions quel dommage nous causions aux récoltes en détruisant les petits oiseaux qui vivent d’insectes, et nous n’avions pas conscience de notre cruauté en arrachant à une mère plus que la vie : ses enfants.

Personne ne nous avait parlé des moineaux du grand Frédéric, à nous, enfants de village, nous avions pour guides l’instinct et la nature. Jamais rien, ni personne, ne dirigeait ou ne redressait nos actions.

Point d’école ! point de livres ! excepté l’Almanach liégeois dans quelques rares maisons ; quant aux conseils, ils se traduisaient en général par une caresse si énergique, que le visage en gardait l’empreinte pendant plusieurs jours. Le temps des parents était absorbé par des affaires plus sérieuses que notre éducation : — les soins du bétail.

Combien nous nous réjouissions à l’approche du Vendredi-Saint, et comme volontairement nous jeûnions le matin, animés d’une stupide crédulité par ce dicton :