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Page:Guinault - Le numéro treize (1880).pdf/14

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LE NUMÉRO TREIZE

Toute la saison d’été nous voyait dans les champs, aussi, quel appétit superbe et quelles bonnes figures joufflues !

Nous n’avions pourtant ni vin vieux, ni viandes rôties tous les jours sur la table, non, non ! du pain, du fromage, des fruits, de la soupe au lard quelquefois, et nous étions robustes à faire plaisir.

Ce qui prouve que le bon air et l’exercice valent mieux pour la santé que les mets les plus exquis.

Quand je parle de mon enfance, votre souvenir se réveille, à mes deux fidèles compagnons ! Rougirai-je de vous parce que vous n’aviez pas la forme qu’on pourrait soupçonner ? Je ne m’abaisserai pas à cette ingratitude.

Qu’en dirais-tu, César, toi qui jouissais d’une si haute réputation, appelé par les commères de chien qui parle, si tu pouvais encore m’entendre ?

Est-ce que le grand Homère lui-même n’eut pas une profonde estime pour le caractère du chien ? Est-ce qu’il dédaigna de parler de ce héros du dévouement à l’instant solennel du retour d’Ulysse ?

Quand je n’aurais pas ce noble exemple à suivre, ta supériorité intellectuelle, ton regard expressif et ce double aboiement qui semblait les deux syllabes de ma-man, m’imposeraient le devoir de le signaler à l’attention de ceux qui pensent avec le bon La Fontaine : « Que l’animal n’est point une machine. »