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Page:Guinault - Le numéro treize (1880).pdf/20

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LE NUMÉRO TREIZE

remuer la langue, voisine, soit dit sans vous offenser.

— Oui-da ! répliqua Mathurine relevant la tête, des tas de faussetés… Merci ! On sait ce qu’on sait, compère, et ceux qui m’ont conté ce que je vous dis, l’ont vu comme je vous vois.

Le père Lascience haussa les épaules en murmurant entre ses dents.

— Sottise… ignorance… superstition.

— Sans compter, reprit Mathurine, que pour tout l’or du monde, je ne passerais pas seule vers les minuit près de la Fontaine du Nain ! J’en ai froid aux os rien que d’y penser ! D’ailleurs, vous savez ce qui s’y fait mieux que moi, peut-être ? dit-elle en lui lançant un regard perfide.

— Moi ? fit le bonhomme en riant, c’est-vrai ! je vais vous le dire, mais, vous savez, c’est entre nous, pas de bavardages !

— Oh ! ça… s’écrièrent toutes les femmes.

— Eh bien ! vous vous en doutez toutes !

Un frisson circula dans l’auditoire.

— Quand il y a de la lune…

— Brrrou…

— Voyons ! écoutez donc Quand il y a de la lune, et qu’elle se trouve au-dessus de la fontaine, elle fait comme la petite Rosette.

— Comme… oh !… quoi donc ?

— Elle se mire dedans.

— Ah ! ah ! ah ! attrape, Rosette.

La petite Rosette rougit jusqu’aux cheveux.

— Cache-t-il son jeu ! grommela Mathurine, allez, allez, père Lascience, on sait ce qu’on sait,