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Page:Guindon - En Mocassins, 1920.djvu/65

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en mocassins

la moralité de la race algique, sans toutefois la dépouiller de certaines caractéristiques qui la font reconnaître. Néanmoins, c’est au nord du Saint-Laurent qu’il faut chercher l’Algonquin primitif, ce véritable enfant de la nature, goûtant surtout, comme les passereaux, la joie de vivre qu’il allie à une endurance incroyable.

Habitué à se suffire à lui-même, à ne compter que sur ses propres efforts, il peut se concentrer tout entier dans l’action présente et déployer, lorsqu’il y est obligé par quelque impérieuse nécessité, des énergies dont un être humain semblerait incapable si les faits n’affirmaient pas le contraire.

Ces faits, les missionnaires du Nord-Ouest en sont encore témoins et racontent des anecdotes comme celle-ci : Une femme gravement malade ne veut pas mourir sans avoir vu le prêtre et purifié sa conscience. Mais, pour satisfaire son désir, il lui faudrait faire un voyage long et pénible, qu’un homme en santé n’accomplirait pas sans de grandes fatigues. La perspective de difficultés apparemment insurmontables pour elle ne l’arrête pas. Prête à braver tous les dangers, elle part à travers les solitudes. Seule dans son canot, elle voyage pendant quatre jours, ramant dur et ne mangeant guère ; luttant contre la douleur, l’épuisement, l’insomnie et le froid.

À force de maîtriser ses souffrances et même de retenir sa vie prête à lui échapper, elle atteint, fan-