Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/348

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avait feint de mener la vie d’un moine, sortit du monastère de Luxeuil. Comme il était entouré d’une suite d’amis et de serviteurs, les exilés dont nous avons parlé recherchèrent sa faveur, et oubliant le mal qui l’avait fait accuser jadis, ils le prirent pour chef, afin de pouvoir, par ses conseils et son secours, se venger de l’homme de Dieu. Ébroin releva donc sa tête venimeuse, et comme une vipère à qui reviennent ses poisons, il feignit d’être dévoué au roi Théodoric, et se mit en marche pour aller au plus tôt vers lui avec ses compagnons. L’homme de Dieu et les siens suivaient la même route, et ils n’étaient pas l’un de l’autre à une journée de distance. Avant qu’ils arrivassent à Autun, Ébroin, oubliant l’amitié qu’il avait si récemment promise à Léger, voulut le faire arrêter à l’instigation de ses partisans ; il l’eût fait s’il n’en eût été détourné par Genêt, évêque de la métropole de Lyon, et si en même temps il n’eût été effrayé par la forte troupe qui accompagnait Léger. Il feignit donc de nouveau de lui porter amitié, et mêlant leurs suites, ils entrèrent dans la ville. Le peuple et toute l’église se réjouissent de la présence vivifiante de leur pasteur ; les places sont ornées, les diacres prennent des cierges, les clercs chantent des antiennes, et toute la ville se livre à la joie du retour de son pontife, après l’orage de la persécution. Ce n’était pas à tort que retentissaient ces louanges, car Léger marchait, comme le savait bien le Seigneur, à la couronne du martyre. Charmée de l’arrivée de son chef, la ville fit des fêtes même à ses adversaires.

Le lendemain tous se mirent en marche, et partirent