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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/139

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son éternel honneur, l’homme ne veuille jamais accepter. Partout où, dans un maître, il ne voit qu’un homme, dès que la volonté qui pèse sur lui n’est qu’une volonté humaine, individuelle comme la sienne, il s’indigne et ne supporte le joug qu’avec courroux. Tel était le véritable caractère, le caractère distinctif du pouvoir féodal ; et telle est aussi l’origine de l’antipathie qu’il n’a cessé d’inspirer.

L’élément religieux qui s’y associait était peu propre à en adoucir le poids. Je ne crois pas que l’influence du prêtre, dans la petite société que je viens de décrire, fût grande, ni qu’il réussît beaucoup à légitimer les rapports de la population inférieure avec le seigneur. L’Église a exercé sur la civilisation européenne une très grande action, mais en procédant d’une manière générale, en changeant les dispositions générales des hommes. Quand on entre de près dans la petite société féodale proprement dite, l’influence du prêtre, entre le seigneur et les colons, est presque nulle. Le plus souvent, il était lui-même grossier et subalterne comme un serf, et très peu en état ou en disposition de lutter contre l’arrogance du seigneur. Sans doute, appelé seul à entretenir, à développer dans la population inférieure quelque vie morale, il lui était cher et utile à ce titre ; il y répandait quelque consolation et quelque lumière ; mais il pouvait et faisait, je crois, très peu de chose pour sa destinée.

J’ai examiné la société féodale élémentaire ; j’ai mis sous vos yeux les principales conséquences qui en devaient découler, soit pour le possesseur du fief lui-même, soit pour sa famille, soit pour la population agglomérée autour de lui. Sortons à présent de cette