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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/149

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Jetons un coup d’œil sur l’histoire générale de la féodalité du dixième au treizième siècle : il est impossible de méconnaître qu’elle a exercé sur le développement individuel de l’homme, sur le développement des sentiments, des caractères, des idées, une grande et salutaire influence. On ne peut ouvrir l’histoire de ce temps sans rencontrer une foule de sentiments nobles, de grandes actions, de beaux développements de l’humanité, nés évidemment du sein des mœurs féodales. La chevalerie ne ressemble guère, en fait, à la féodalité, cependant elle en est la fille ; c’est de la féodalité qu’est sorti cet idéal des sentiments élevés, généreux, fidèles. Il dépose en faveur de son berceau.

Portez d’un autre côté votre vue : les premiers élans de l’imagination européenne, les premiers essais de poésie, de littérature, les premiers plaisirs intellectuels que l’Europe ait goûtés au sortir de la barbarie, c’est à l’abri, sous les ailes de la féodalité, c’est dans l’intérieur des châteaux que vous les voyez naître. Pour ce genre de développement de l’humanité, il faut du mouvement dans l’âme, dans la vie, du loisir, mille conditions qui ne pouvaient se rencontrer dans l’existence pénible, triste, grossière, dure, du commun peuple. En France, en Angleterre, en Allemagne, c’est aux temps féodaux que se rattachent les premiers souvenirs littéraires, les premières jouissances intellectuelles de l’Europe.

En revanche, si nous consultons l’histoire sur l’influence sociale de la féodalité, elle nous répondra, toujours d’accord avec nos conjectures, que partout le régime féodal a été opposé tant à l’établissement