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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/252

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le mahométisme ; il l’avait vaincu en Europe après en avoir été dangereusement menacé ; il était parvenu à le confiner en Espagne. Là encore, il travaillait constamment à l’expulser. On a présenté les croisades comme une espèce d’accident, comme un événement imprévu, inouï, né des récits que faisaient les pèlerins au retour de Jérusalem, et des prédications de Pierre l’Ermite. Il n’en est rien. Les croisades, Messieurs, ont été la continuation, le zénith de la grande lutte engagée depuis quatre siècles entre le christianisme et le mahométisme. Le théâtre de cette lutte avait été jusque-là en Europe ; il fut transporté en Asie. Si je mettais quelque prix à ces comparaisons, à ces parallélismes dans lesquels on se plaît quelquefois à faire entrer, de gré ou de force, les faits historiques, je pourrais vous montrer le christianisme fournissant exactement en Asie la même carrière, subissant la même destinée que le mahométisme en Europe. Le mahométisme s’est établi en Espagne, il y a conquis et fondé un royaume et des principautés. Les chrétiens ont fait cela en Asie. Ils s’y sont trouvés, à l’égard des mahométans, dans la même situation que ceux-ci en Espagne à l’égard des chrétiens. Le royaume de Jérusalem et le royaume de Grenade se correspondent. Peu importent, du reste, ces similitudes. Le grand fait, c’est la lutte des deux systèmes religieux et sociaux. Les croisades en ont été la principale crise. C’est là leur caractère historique, le lien qui les rattache à l’ensemble des faits.

Une autre cause, l’état social de l’Europe au onzième siècle, ne contribua pas moins à les faire éclater. J’ai pris soin de bien expliquer pourquoi, du