Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/267

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Si tel est le fait auquel a abouti la civilisation européenne, tel est aussi le but vers lequel nous devons tendre, où nos recherches doivent nous conduire. Il faut que nous voyions naître, se développer, s’affermir progressivement ce grand résultat. Nous sommes entrés dans l’époque à laquelle on peut faire remonter son origine ; c’est, vous l’avez vu, entre le douzième et seizième siècle que s’est opéré en Europe le travail lent et caché qui a amené notre société à cette nouvelle forme, à cet état définitif. Nous avons également étudié le premier grand événement qui, à mon avis, ait poussé clairement et puissamment l’Europe dans cette voie, les croisades.

Vers la même époque, à peu près au moment où éclataient les croisades, commença à grandir l’institution qui a peut-être le plus contribué à la formation de la société moderne, à cette fusion de tous les éléments sociaux en deux forces, le gouvernement et le peuple ; c’est la royauté.

Il est évident que la royauté a joué un rôle immense dans l’histoire de la civilisation européenne ; un coup d’œil sur les faits suffit pour s’en convaincre ; on voit le développement de la royauté marcher du même pas, pour ainsi dire, au moins pendant longtemps, que celui de la société elle-même : les progrès sont communs. Et non-seulement les progrès sont communs ; mais toutes les fois que la société avance vers son caractère définitif et moderne, la royauté paraît grandir et prospérer ; si bien que, lorsque l’œuvre est consommée, lorsqu’il ne reste plus, ou à peu près, dans les grands États de l’Europe, d’autre influence importante et décisive que celle