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Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/297

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de croyance aveugle et de liberté d’esprit dans les rapports des seigneurs laïques avec les prêtres. On retrouve là quelques débris de leur situation primitive. Vous vous rappelez comment j’ai essayé de vous peindre l’origine de la féodalité, ses premiers éléments, et la manière dont la société féodale élémentaire s’était formée autour de l’habitation du possesseur du fief. J’ai fait remarquer combien le prêtre était là au-dessous du seigneur. Eh bien ! il est toujours resté dans le cœur de la noblesse féodale un souvenir, un sentiment de cette situation ; elle s’est toujours regardée, non-seulement comme indépendante de l’Église, mais comme supérieure, comme seule appelée à posséder, à gouverner vraiment le pays ; elle a toujours voulu vivre en bon accord avec le clergé, mais en lui faisant sa part, et ne se laissant pas faire la sienne. Pendant bien des siècles, Messieurs, c’est l’aristocratie laïque qui a maintenu l’indépendance de la société à l’égard de l’Église ; elle s’est fièrement défendu quand les rois et les peuples étaient domptés. Elle a combattu la première, et plus contribué peut-être qu’aucune autre force à faire échouer la tentative d’organisation théocratique de la société.

Un troisième obstacle s’y est également opposé dont on a en général tenu peu de compte, et souvent même mal jugé l’effet.

Partout où un clergé s’est emparé de la société et l’a soumise à une organisation théocratique, c’est à un clergé marié qu’est échu cet empire, à un corps de prêtres se recrutant dans son propre sein, élevant des enfants depuis leur naissance dans la même et