Aller au contenu

Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/298

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pour la même situation. Parcourez l’histoire ; interrogez l’Asie, l’Égypte ; toutes les grandes théocraties sont l’ouvrage d’un clergé qui est lui-même une société complète, qui se suffit à lui-même, et n’emprunte rien au dehors.

Par le célibat des prêtres, le clergé chrétien s’est trouvé dans une situation toute différente ; il a été obligé de recourir sans cesse, pour se perpétuer, à la société laïque, d’aller chercher au loin, dans toutes les positions, toutes les professions sociales, les moyens de durée. En vain l’esprit de corps faisait ensuite un grand travail pour s’assimiler ces éléments étrangers ; quelque chose restait toujours de l’origine de ces nouveaux venus ; bourgeois ou gentilshommes, ils conservaient toujours quelque trace de leur ancien esprit, de leur condition première. Sans doute le célibat, en faisant au clergé catholique une situation toute spéciale, étrangère aux intérêts et à la vie commune des hommes, a été pour lui une grande cause d’isolement ; mais il l’a aussi forcé de se rattacher sans cesse à la société laïque, de s’y recruter, de s’y renouveler, de recevoir, de subir une partie des révolutions morales qui s’y sont accomplies ; et je n’hésite pas à penser que cette nécessité toujours renaissante a beaucoup plus nui au succès de la tentative d’organisation théocratique, que l’esprit de corps, fortement entretenu par le célibat, n’a pu la servir.

Le clergé a rencontré enfin dans son propre sein de puissants adversaires de cette tentative. On parle beaucoup de l’unité de l’Église ; et il est vrai qu’elle y a constamment aspiré, qu’elle y a même heureusement