Page:Guizot - Histoire générale de la civilisation en Europe, 1838.djvu/383

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que Cromwell ait été Mirabeau ; il manquait d’éloquence et, quoique très-actif, n’obtint, dans les premières années du long parlement, aucun éclat. Mais il a été successivement Danton et Buonaparte. Il avait plus que nul autre contribué à renverser le pouvoir ; il le releva parce que nul autre que lui ne le sut prendre et manier ; il fallait bien que quelqu’un gouvernât ; tous y échouaient ; il y réussit. Ce fut là son titre. Une fois maître du gouvernement, cet homme dont l’ambition s’était montrée si hardie, si insatiable, qui avait toujours marché poussant devant lui la fortune, décidé à ne s’arrêter jamais, déploya un bon sens, une prudence, une connaissance du possible, qui dominaient ses plus violentes passions. Il avait sans doute un goût extrême de pouvoir absolu et un très-vif désir de mettre la couronne sur sa tête et dans sa famille. Il renonça à ce dernier dessein dont il sut reconnaître à temps le péril ; et quant au pouvoir absolu, quoiqu’il l’exerçât en fait, il comprit toujours que le caractère de son temps était de n’en pas vouloir, que la révolution à laquelle il avait coopéré, qu’il avait suivie dans toutes ses phases, avait été faite contre le despotisme, et que le vœu impérissable de l’Angleterre était d’être gouvernée par un parlement et dans les formes parlementaires. Lui-même alors, despote de goût et de fait, il entreprit d’avoir un parlement et de gouverner parlementairement. Il s’adressa successivement à tous les partis ; il tenta de faire un parlement avec les enthousiastes religieux, avec les républicains, avec les presbytériens, avec les officiers de l’armée. Il tenta toutes les voies pour constituer un parlement