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Page:Guizot - Mélanges politiques et historiques, 1869.djvu/262

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Je ne cherche point à éluder le crime ; je ne souhaite point qu’il soit méconnu, ni qu’il échappe à son juste châtiment. Je souhaite seulement que le crime soit réel, le châtiment juste. Les lois sont faites pour être appliquées, et appliquées seulement aux cas pour lesquels elles sont faites.

C’est au pouvoir judiciaire qu’il appartient de maintenir cette application de la loi dans ses limites légitimes. C’est à lui qu’est confié le soin de prévenir l’effet de cette fatale méprise qui porte d’autres pouvoirs à les méconnaître, et à poursuivre comme complot, des actes où se décèlent des dispositions, des intentions, dangereuses sans doute, mais contre lesquelles des remèdes d’une autre nature sont seuls efficaces et légaux. En veillant ainsi à la porte des lois, le pouvoir judiciaire ne défend pas seulement les citoyens, il se défend lui-même ; il protège son propre domaine, il repousse cette invasion de la justice par la politique, dans laquelle la justice a tout à perdre et où la politique n’a rien à gagner. Une vieille expérience l’a prouvé. Pourquoi faut-il que la politique qui réclame si souvent l’autorité de l’expérience, oublie si souvent elle-même d’en tenir compte ?