Mais tu détournes la tête, tu te caches de ton épouse, qu’y a-t-il donc ? Ô père des dieux, j’ai entendu dans les chênes de Dodone tes colombes noires qui croassaient comme des corbeaux.
Il s’en va ! il me repousse ! encore un autre amour, sans doute ? insensé qui perd sa force ainsi et qui ne sait pas que les mortels s’enflent d’orgueil à découvrir chaque matin sur leur oreiller les cheveux de Jupiter !
Notre vie pourtant était si douce, dans l’équilibre obligé de nos discordes et de nos amours. Diverse et magnifique, elle demeurait immuable comme la Terre avec ses océans en mouvement et ses plaines immobiles. Oh ! reviens, fils de Saturne ! je t’ai toujours aimé, je t’aimerai, nous nous coucherons sur l’Ida, et cachés par les nuages, au sein d’une atmosphère vermeille, de mes bras blancs j’entourerai ton cou, je sourirai sous toi, je passerai mes doigts dans les boucles de ta barbe, et je réjouirai ton cœur, ô Père des dieux. N’ai-je donc plus ma chevelure brune, mes grands yeux, mon cothurne d’or ? N’est-ce pas pour toi que tous les ans je refais ma virginité dans la fontaine Canathus ? Ne suis-je plus belle ? me trouverait-il vieille ?
En effet, depuis quelque temps il me néglige, je l’entends la nuit qui rêve tout haut. Songerait-il à transmettre à quelque autre l’empire qui m’appartient ? Oh ! je me vengerai !
Quoi ! plus de bruit ! je vais, je viens, je cours dans l’Olympe ; tous sont endormis, ou disparus, j’appelle, Écho même semble mort !
Mais comment feront les mères si je ne veille plus à leur chevet ? qui graissera le seuil de l’époux pour y recevoir la fiancée ? à quoi servira la branche de figuier que la matrone discrète emporte sous sa robe ?
Oui, oui ! au pied de mes images, mes couronnes d’astérion s’effeuillent comme celles des tombeaux ; la main de la Ménade a déchiré mon voile en pièces, les cent bœufs d’Argos ont perdu leurs guirlandes, et telle qu’une harangère des ports, ma prêtresse oublieuse se gorge de poissons frits. Ô vertu de la Pudeur ! voilà la Courtisane aux joues fardées qui touche à mes autels !
Comment, moi Pallas, moi la fille de Jupiter, qui vivais à sa