Page:Guy de Maupassant - Une vie.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Tous les jours elle y retourna, et tous les jours Rosalie éclatait en sanglots en apercevant sa maîtresse.

L’enfant fut mis en nourrice chez une voisine.

Julien cependant parlait à peine à sa femme, comme s’il eût gardé contre elle une grosse colère depuis qu’elle avait refusé de renvoyer la bonne. Un jour il revint sur ce sujet, mais Jeanne tira de sa poche une lettre de la baronne demandant qu’on lui envoyât immédiatement cette fille si on ne la gardait pas aux Peuples. Julien, furieux, cria : « Ta mère est aussi folle que toi. » Mais il n’insista plus.

Quinze jours après, l’accouchée pouvait déjà se lever et reprendre son service.

Alors Jeanne, un matin, la fit asseoir, lui tint les mains et, la traversant de son regard :

— Voyons, ma fille, dis-moi tout.

Rosalie se mit à trembler, et balbutia :

— Quoi, madame ?

— À qui est-il, cet enfant ?

Alors la petite bonne fut reprise d’un désespoir épouvantable ; et elle cherchait éperdument à dégager ses mains pour s’en cacher la figure.