Il y a, selon Hugo, « le labeur visible et le labeur invisible » ; penser, c’est agir : — « Les bras croisés travaillent, les mains jointes font. Le regard au ciel est une œuvre. Les esprits irréfléchis et rapides disent : — À quoi bon ces figures immobiles du côté du mystère ? à quoi servent-elles ? qu’est-ce qu’elles font ? — Hélas ! en présence de l’obscurité qui nous environne et qui nous attend, ne sachant pas ce que la dispersion immense fera de nous, nous répondons : Il n’y a pas d’œuvre plus sublime peut-être que celle que font ces âmes. Et nous ajoutons : il n’y a peut-être pas de travail plus utile. Pour nous, toute la question est dans la quantité de pensée qui se mêle à la prière. Nous sommes de ceux qui croient à la misère des oraisons et à la sublimité de la prière[1]. » On connaît les paroles d’adoration que Victor Hugo lui-même a prononcées dans le livre consacré à sa fille :
Je viens à vous, Seigneur, père auquel il faut croire ;
Je vous porte, apaisé,
Les débris de ce cœur tout plein de votre gloire,
Que vous avez brisé.
Je viens à vous, Seigneur, confessant que vous êtes
Bon, clément, inckilgent et doux, ô Dieu vivant !
Je conviens que vous seul savez ce que vous faites,
Et que l’homme n’est rien qu’un jonc qui tremble au vent.
Je ne résiste plus à tout ce qui m’arrive
Par votre volonté.
L’âme de deuil en deuil, l’homme de rive en rive
Roule à l’éternité…
Dès qu’il possède un bien, le sort le lui retire ;
Rien ne lui fut donné dans ses rapides jours,
Pour qu’il s’en puisse faire une demeure, et dire :
C’est ici ma maison, mon champ et mes amours !
Il doit voir peu de temps tout ce que ses yeux voient ;
Il vieillit sans soutiens.
Puisque ces choses sont, c’est qu’il faut qu’elles soient ;
J’en conviens, j’en conviens !
Dans vos cieux, au delà de la sphère des nues,
Au fond de cet azur immobile et dormant,
Peut-être faites-vous des choses inconnues,
Où la douleur de l’homme entre comme élément[2].