Page:Guyau - La Genèse de l’idée de temps.djvu/88

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
46
GENÈSE DE L’IDÉE DE TEMPS

aussi à cause de l’effacement de leurs contours.

Nous avons tracé dans son ensemble, la genèse de l’idée de temps, nous avons montré son origine tout empirique et dérivée. L’idée de temps comme celle d’espace, est empiriquement le résultat de l’adaptation de notre activité et de nos désirs à un même milieu inconnu, peut-être inconnaissable. Qu’est-ce qui correspond en dehors de nous à ce que nous appelons le temps, l’espace ? nous n’en savons rien ; mais le temps et l’espace ne sont pas des catégories toutes faites et préexistantes en quelque sorte à notre activité, à notre intelligence. En désirant et en agissant dans la direction de nos désirs, nous créons à la fois l’espace et le temps ; nous vivons, et le monde, ou ce que nous appelons tel, se fait sous nos yeux. Aussi est-ce surtout l’énergie de la volonté qui produit la ténacité de la mémoire, au moins en ce qui concerne les événements. Là où notre moi est intéressé, soit qu’il prenne les devants et agisse sur les choses, soit que les choses, en agissant violemment sur lui, excitent une réaction proportionnelle, le souvenir se fixe, se creuse, se donne à lui-même une énergie qui persiste à travers la durée.