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Page:Guyau - Vers d’un philosophe, 1881.djvu/204

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SPINOZA.

Le mal, s’il peut encor produire en moi la peine,
Éveille en me blessant ma curiosité ;
Le présent a pour moi cette sérénité
Que le passé répand sur toute chose humaine.
Le présent, en effet, le passé, tout se vaut
Pour qui cherche ici-bas, non les faits, mais les causes,
Et l’esprit clair qui sait regarder d’assez haut
Dans un même lointain voit reculer les choses.

En ce calme j’ai cru découvrir le bonheur.
Parfois, pourtant, s’éveille un doute dans mon cœur.
Celui qui comprend tout et n’accuse personne,
Celui qui ne hait point, pourra-t-il bien aimer ?
L’amour, comme la haine, échappe à qui raisonne ;
L’amour craint la clarté : pour que le cœur se donne,
Qui sait si l’œil d’abord ne doit pas se fermer ? »