Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/132

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brvon, à l’état de fœtus, à les former, à les nourrir ; mais il doit encore les enfanter, et nul enfantement, je vous le dis, n’est aussi terrible que celui-là. Il ne peut aller que par des tâtonnements. Ce qu’il a fait hier, il faut qu’il le détruise demain. Il s’aperçoit aujourd’hui que le calcul qu’il croyait vrai est faux. Ici c’est une loi scientifique qui lui a fait commettre une erreur ; là c’est un de ses matériaux qui n’a pas les qualités qu’il lui attribuait. Puis c’est un ouvrier qui a mal compris et mal exécuté son plan ; c’est le plan lui-même qui est erroné en certains endroits, chose dont il ne peut s’apercevoir qu’en le traduisant. Il faut qu’il le corrige, et la lutte recommence terrible, acharnée entre sa pensée et la matière.

Qui donc peindra cette lutte si passionnée, si ardente, si dévorante que si peu de gens soupçonnent ?

Je ne vais pas suivre les essais qu’a faits chaque inventeur pour accomplir son œuvre. Souvent ils ont été retracés, mais ils ne l’ont peut-être pas été assez intimement. Les dernières histoires des inventions et découvertes qui ont été publiées jusqu’à ce jour n’ont pas suffisamment pénétré dans le drame de l’enfantement qui a précédé toute œuvre, drame émouvant et terrible, mais impossible à suivre dans toutes ses phases.

Je vais seulement ici citer un fait, qui vous prouvera les difficultés qui se rencontrent dans l’exécution de la moindre invention.

Un jour, un bourgmestre de Magdebourg conçoit la magnifique idée de faire le vide.

D’abord, pour la réaliser, Otto de Guericke essaye de se servir d’un tonneau fermé de toutes parts. Il applique à sa partie inférieure un tuyau de pompe à incendie. Il fait jouer la pompe ; mais, même avant que toute l’eau fût évacuée, la pression atmosphérique brisait le tonneau.

Otto de Guericke ne se décourage pas, il en relie les douves avec des cercles plus forts.