Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/237

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moins tout semble le prouver jusqu’à présent, j’ose le dire, car le rapport que M. Velpeau a lu devant l’Académie n’est qu’un réquisitoire basé sur l’autorité de son auteur, non sur des faits. Ce que les médecins ne peuvent nier, c’est leur caractère. Cagliostro le savait bien lui qui, ayant fait de nombreuses guérisons, s’était aliéné le corps médical. Aussi répondait-il à deux étudiants qui étaient venus le consulter : « Surabondance de bile cbez MM. les membres de la Faculté. » Toujours la même maladie : la conversation suivante que rapporte M. Os. Comettant le prouve bien.

« Je vous ai dit, mon cher Desnoyers, que certains médecins font, dans je ne sais quel but, tous les efforts pour insinuer à Sax qu’il n’est pas guéri. Sax les écoute avec une bienveillance et un sang-froid qui m’étonnent toujours. Il est vrai que le célèbre Hufeland dit quelque part qu’un des meilleurs moyens de vivre longtemps est de donner à son imagination une direction agréable.

« L’autre jour arrive chez le facteur un médecin (il en vient cinquante par jour). J’entre au moment où ce monsieur dont la physionomie était souriante, dont la voix était douce et persuasive, disait à Sax : « Je vous assure, monsieur Sax, que vous n’êtes pas guéri.

« — Pourtant je dors bien, je mange bien, je suis fort, j’ai l’esprit lucide, je ne souffre nulle part, et je ne me suis jamais senti si plein de vie.

« — Ça ne fait rien, monsieur Sax, vous n’êtes pas guéri : je vous assure, foi d’honnête homme, que vous n’êtes pas guéri. Ça ne vous fait rien, n’est-ce pas, que je vous dise ça ?

« — Non, répondit Sax, vous pouvez continuer, car je ne demande qu’à être longtemps malade, comme je le suis en ce moment.

« — Ah ! tant mieux que ça ne vous fasse rien, ce que je vous dis. Eh bien, croyez-le bien, le cancer, voyez-vous, ne pardonne jamais. Ah ! monsieur Sax, je n’ai pas l’honneur