Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/293

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sa partie. Aussi ne sauriez-vous vous imaginer jusqu’où va sa nullité dans les autres branches des connaissances humaines. Le calcul lui a desséché le cœur et le cerveau... l’extinction de ses talents l’a conduit à faire dépenser un million au lieu de 200,000 fr. au département. J’ai voulu protester, éclairer le préfet, mais un ingénieur de mes amis m’a cité l’un de nos camarades devenu la bête noire de l’administration pour un fait de ce genre... Dès qu’un des nôtres commet une lourde faute, l’administration, qui ne doit jamais avoir tort, le retire du service actif en le faisant inspecteur. »

Ajoutons aussi que l’État est mesquin dans la manière dont il rétribue la science ; il ne donne pas au savant des récompenses en rapport avec ses travaux ; il lui donne des charges, des fonctions qui l’usent, l’abrutissent comme l’ingénieur en chef. 11 charge un homme de génie d’aller faire faire des additions à des moutards et il tue Ampère en l’assujettissant à des devoirs, incompatibles avec sa nature distraite, pour lesquels il n’était assurément pas besoin d’un homme supérieur, et qu’il remplissait fort mal.

Est-ce donc en envoyant des hommes de génie inspecter des enfants qu’on prétend honorer et encourager la science ? Y a-t-il besoin d’être Le Verrier pour bien apprécier si les élèves de troisième connaissent suffisamment les éléments de la géométrie ? N’est-ce pas ridicule ? De plus, sous prétexte de donner une récompense, n’infligez-vous pas une torture ? Le savant, le vrai savant regarde le temps comme le plus précieux de ses biens. Si vous prenez ce temps, si vous prenez sa pensée, vous le frappez par cela même d’impuissance, vous le réduisez à l’inertie ; si, à un Age déjà avancé et où la pensée a pris un pli qu’elle ne peut plus perdre, vous le forcez de se livrer à des travaux qui lui sont antipathiques, vous le tuez. Et vous appelez cela encourager la science ! Quant à moi je me défierai toujours des sénateurs qui auront nom Dumas, Le Verrier, etc. Il faut qu’ils né-