Page:Guyot - L'Inventeur.djvu/337

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ploitant seul ? Quand les inventions retomberaient dans le domaine public à la suite de l’expiration des brevets, personne n’en jouirait donc plus ? il n’y aurait donc plus d’exploitation profitable ? »

Il y a une bien grande différence entre une invention qui tombe dans le domaine public et une invention qui naît ; la première a déjà fait ses preuves ; on a eu le temps de l’étudier ; on connaît la meilleure manière de l’exploiter. En est-il donc de même de la seconde ? Celle-ci n’est-elle pas si hasardeuse que toujours les capitalistes reculent devant l’entreprise de son exploitation ?

« Lui-même peut encore continuer à faire des bénéfices à côté de ses concurrents. »

Certainement, parce qu’il y a quinze ans qu’il exploite cette invention, parce qu’il est installé, qu’il a des relations, des débouchés ; qu’il l’a fait accepter au consommateur et qu’il a un roulement d’affaires.

Encore une objection bien grosse qu’on vous présente avec fracas.

Je découvre une merveille qui doit être un bienfait immense pour l’humanité. Je prends un brevet, je le monopolise à mon profit ; n’est-ce pas atroce ? En agissant ainsi, est-ce que je ne fais pas preuve d’un monstrueux égoïsme ?

Aussi quand Jakson et Morton ont pris un brevet pour l ’éthérisation, quelles clameurs on a poussées contre eux ! Jakson en fut tellement ému qu’il refusa de toucher sa part de bénéfices.

Il eut tort, je le déclare hautement. Il serait plaisant, en vérité, que plus la découverte serait belle, moins elle devrait rapporter de bénéfices à l’inventeur ! Il serait le bienfaiteur de l’humanité, et il ne devrait rien exiger d’elle en retour ! S’il osait dire timidement qu’elle a contracté une dette envers lui, il serait honni et bafoué ! S’il osait demander qu’on la lui payât, il entendrait crier haro sur lui !

En partant de ce principe, auraient seuls le droit de ré-