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frottement sur les bancs du collège ; vus de loin, ils font un certain effet : ils citent des dates précises ; ils savent en quelle année Mérovée est mort ; ils vous réciteront tous les noms des rois d'Égypte ; ils placeront à propos un vers latin, et même un vers grec… Éprouvez le diamant, vous trouverez du stras.

Le baccalauréat ne travaille qu'en faux ; les jeunes gens énergiques, vigoureux ne peuvent pas entrer dans son moule.

Pour lui la surface est tout, peu lui importe le fond. Il ne demande au jeune homme que de la mémoire ; il ne lui demande pas d'idées ; il regarde l'homme comme une de ces tablettes de cire dont se servaient les Romains ; l'homme est une machine à apprendre ; quant à la raison, il peut s'en passer.

Les aspirants au baccalauréat connaissent bien les opinions de leurs examinateurs, et ils en profitent.

Savez-vous comment se prépare cet examen ? on achète un Manuel, celui de Lefranc, par exemple, et, deux ou trois mois avant 1'examen, on se met à peu près à l'apprendre par cœur. Rien de plus commode que ce Manuel ; M. Lefranc est un homme intelligent : il a compris les nécessités du baccalauréat. Ancien membre de l'Université, il les connaît par expérience. Aussi a-t-il rédigé son Manuel dans le sens demandé par les professeurs, c'est-à-dire que ce Manuel ne contient qu'une masse de faits, de formules, de dates sans liaison entre eux, n'apprenant rien, ne disant rien à l'intelligence. Mais qu'on le sache par cœur, qu'on le récite à peu près, et on passe un examen triomphal. Il est vrai qu'on est si abruti par cette étude, qu'il faut au moins un mois pour s'en remettre. Au bout d'un mois on a oublié tout cela, on s'est débarrassé le cerveau de tout ce fatras inutile, on redevient soi-même et on recouvre l'intelligence quand on a oublié la dernière ligne du Manuel.

Alors, les deux ou trois mois qui ont précédé ou suivi le