Page:Guyot - Les principes de 89 et le socialisme.djvu/180

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Nous avons cité le passage des mémoires de Louis XIV dans lequel il proclame bien haut ce principe[1] et M. de Villeroy le confirmait quand, en montrant à Louis XV, enfant de cinq ans, le peuple assemblé, il lui disait : « Sire, tout ce que vous voyez est à vous. »

Que signifiaient ces affirmations ? sinon l’incarnation dans l’absolutisme royal du collectivisme primitif d’où l’homme a évolué peu à peu, à travers les siècles, pour aboutir à la propriété individuelle — ce que déplorent, mais ce que reconnaissent eux-mêmes les socialistes de bonne foi[2].

La Révolution, dégageant l’individu de cette absorption dans la personne royale, devait affirmer la propriété individuelle, parce que la propriété est l’agrandissement, le prolongement de la personnalité humaine. Les physiocrates avaient proclamé bien haut la propriété personnelle de chaque individu sur lui-même ; mais cette propriété personnelle serait précaire, si elle n’avait pour complément une propriété objective.

D’où cette conséquence : chaque individu doit pouvoir faire tous les actes nécessaires à acquérir et doit pouvoir user des choses acquises à son gré, au mieux de ses intérêts, tels qu’il les entend : c’est la liberté du travail. Chaque individu doit être assuré qu’un ou plusieurs ne le dépouilleront pas de ses biens, par vol, par fraude ou par violence : c’est la sûreté.

  1. V. suprà, page 50.
  2. Letourneau, l’Évolution de la propriété. Introd. p. VII.