Page:Gyp - Bijou, Calmann-Levy, 1896.djvu/101

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— Et depuis… voyons ?… combien ?… trois heures, depuis trois heures que nous nous connaissons… vous avez déjà de l’amitié pour moi ?…

M. de Clagny répondit, sérieux, ému presque :

— Beaucoup !…

— Tant mieux !… parce que, voyez-vous, moi aussi je vous aime beaucoup !… oh ! mais beaucoup, beaucoup !…

Et, comme si elle se parlait à elle-même, elle ajouta :

— Je m’étais fait de vous une idée très différente… je m’attendais à vous trouver tout autre…

Il dit, tristement :

— Plus jeune ?…

— Au contraire !… on vous représentait comme un ami de mon grand-père… grand’mère disait toujours « mon vieil ami Clagny »… alors, vous comprenez… quand je vous ai vu, j’ai été saisie…

— Pourquoi ?…

— Parce que vous m’avez fait l’effet d’avoir… je ne sais pas trop… quarante-cinq ans, peut-être ?… enfin… quelque chose comme Paul de Rueille… et puis… vous êtes très beau… et moi, j’aime beaucoup qu’on soit beau…

— C’est votre cousin de Blaye qui est beau !… Elle sembla chercher dans sa mémoire :

— Jean ?… est-il si beau que ça ?… il ne me fait pas cet effet-là… vous savez… quand on vit ensemble, on finit par ne plus se voir !…

— Je suis bien sûr qu’il vous voit, lui !…

— Que non !… on ne me voit pas tant que