Page:Gyp - Bijou, Calmann-Levy, 1896.djvu/116

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— Ne jurez pas !… vous avez d’autant mieux dû l’avoir, cette opinion, que je n’ai pas jugé devoir vous raconter ce qu’avait été jusque-là ma vie… vous avez pu croire que je trompais, sans le moindre remords, un mari peut-être affectueux et bon…

— Je n’ai rien cru du tout… sinon que je vous adorais…

Anxieux, il bégaya :

— Et… et vous n’allez plus vouloir m’aimer ?…

Elle dit, stupéfaite de tant d’égoïsme ingénu :

— Ainsi… vous souhaitez que je continue à vous aimer ?…

— Si je le souhaite ?… mais qu’est-ce que je deviendrai sans vous !… vous qui êtes toute ma vie !

Et comme elle reculait, effarée :

— Ah çà !… qu’est-ce que vous avez donc supposé ?… que j’allais épouser Bijou, peut-être ?…

— Mais oui…

Il allait lui expliquer pourquoi il ne pouvait pas épouser sa cousine, mais il pensa que l’impossibilité matérielle rendrait blessant son retour à madame de Nézel qu’il aimait tendrement, et il dit :

— Je n’ai pour Bijou qu’un entraînement passager et violent… que voulez-vous !… il est impossible de vivre auprès d’elle sans être grisé de sa beauté, affolé par sa coquetterie inconsciente et naïve… pendant ces quinze jours j’ai été fou… je le suis encore !… mais en vous revoyant ce soir, j’ai bien senti que c’est vous seule que j’aime, vous seule à qui j’appartiens…