Page:Gyp - Bijou, Calmann-Levy, 1896.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Si… tout d’même.. y en a eune…

Elle demanda, attachant sur le paysan son beau regard ingénu :

— Laquelle ?…

Lavenue devint plus rouge encore, et, se baissant d’un mouvement gauche pour ramasser sa casquette qu’il venait de laisser tomber, il balbutia :

— J’peux point l’dire… c’est point eun’femme pour moi !…

Bijou n’entendit pas sa réponse. La taille cambrée, la tête renversée, elle buvait lentement un second bol de lait. Et le fermier qui se relevait resta un instant immobile, les yeux élargis, contemplant cette créature fragile avec une admiration craintive et ahurie, tandis qu’à son visage montaient des bouffées chaudes qui l’étouffaient. Et comme Bijou, qui avait fini de boire, l’examinait en souriant, il dit, essuyant du dos de sa main son front où perlaient d’énormes gouttes de sueur :

— Nom de nom, qu’y fait chaud !…

— Je vous remercie, monsieur Lavenue, — fit Denyse qui se leva, — votre lait était exquis… Il demanda, l’air malheureux :

— Et comme ça, c’est-y qu’c’est qu’vous partez déjà ?…

— Comment « déjà ?… » mais il y a au moins un quart d’heure que je suis chez vous !…

Il balbutia :

— Y n’m’a point paru long, c’quart d’heure là !…