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Dans le premier cas c’est la Raison individuelle qui gouverne ;

Dans le second c’est la Raison de l’humanité.

Mais cette loi de Hiérarchie peut-elle rationnellement s’appliquer aux rapports des êtres humains entre eux ?

Non ; car ils sont de la même espèce ;

Car chacun d’eux a sa raison, son sens moral, son libre-arbitre, sa volonté ;

Car chacun d’eux n’est qu’un élément de destinée collective ; un être incomplet au point de vue de cette destinée, et n’a pas plus la faculté de classer les autres , que les autres de le classer ;

Car chacun d’eux est progressif en lui-même et dans sa race et peut, par la culture, monter du dernier rang au plus élevé sous le rapport de l’utilité.

Qu’à l’origine des sociétés, l’homme, se distinguant à peine des autres espèces sur lesquelles il établissait son Droit par la ruse et la force, ait transporté cette notion brutale dans les rapports humains, ait confondu le semblable faible d’esprit ou de corps avec l’animal, se soit cru, au même titre, droit de possession sur eux, et n’ait reconnu comme libres et égaux à lui que les forts et les intelligents, les choses ne pouvaient se passer autrement peut-être.

Que, plus développée, l’humanité ait transformé la notion de Droit sur le modèle du gouvernement de soi-même, ait, en conséquence, établi la hiérarchie et subordonné certaines classes, certaines castes, aux individus qu’elle considérait comme les représentants de la Raison et de la Justice, les choses ne pouvaient peut-être encore se passer autrement.

T. II.
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