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Page:Hériot - Une âme à la mer, 1929.pdf/170

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une âme à la mer

Je crains que la mer ne soit pas assez rude pour eux, pour devenir une leçon.

Auront-ils faim ? soif ? connaîtront-ils le chaud et le froid ?

Je crains que le luxe qui les accompagne, ne tue le vrai contact de la mer.

Les embruns monteront-ils jusqu’à eux ?

Sentiront-ils leur saveur amère sur leurs lèvres, pour leur faire souvenir qu’ici-bas il y a des êtres qui pleurent ?

Rencontreront-ils la peur, dans cette chose splendide qu’est une tempête ?

Ils ne connaissent certainement pas assez la mer pour la craindre et se méfier d’elle toujours, alors le jour où elle se révélera terrifiante mais vraie à leurs yeux, ils songeront à la mort, au lieu de l’accepter comme un spectacle grandiose.

Et ils auront peur,

Et ils seront angoissés, et ce jour-là plus que jamais je voudrais être à bord du cher bateau de mon enfance, pour endurer, sourire et lutter contre ce coup de chien, car j’ai pris l’habitude de trimer dur sur mon voilier, et je sais ce que c’est que d’être en perdition.

Par la pensée, ce matin, de grand matin, j’ai fait ma visite quotidienne à bord du bateau de mon en-