Aller au contenu

Page:Hériot - Une âme à la mer, 1929.pdf/171

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
165
le bateau de mon enfance

fance, dans ce luxe exagéré, si mal approprié sur l’eau.

Je passe vite dans les salons, plaçant cependant quelques poupées invitées, sur certaines bergères bleues et roses ; et partout des fleurs artificielles, elles foisonnent dans les vases et sur les meubles, il y en a partout, jardin faux et navrant.

Je monte sur le pont, là je respire, encore un peu chez moi, comme jadis, j’adresse quelques sourires à cet équipage muet et étranger, et plus avant je monte sur la passerelle ; là mon âme est tout à fait chez elle. Je dis bonjour au Capitaine, à ce grand marin qui connut autrefois la grande navigation des clippers. Sans paroles je reste longuement, puis je m’enfuis en leur laissant un doux sourire, et je m’échappe comme je suis venue, silencieusement, car le voilier à bord duquel je navigue a besoin de moi.

Vous pouvez parfois guider votre pensée et choisir sa route, et l’obliger à être là, mais à d’autres instants elle s’échappe. Me voici à la barre de mon « Ailée », faisant mon quart ; par jolie brise au près magnifiquement elle serre le vent faisant ses 7 nœuds. Elle est belle à voir ainsi, cependant mon esprit à nouveau s’est échappé sur le bateau de mon enfance qui navigue ensoleillé, ce matin, sur les côtes d’Espagne. Le quart de midi sonne, mais c’est l’autre son