Page:Hérodien - Histoire romaine, depuis la mort de Marc-Aurèle jusqu'à l'avénement de Gordien III (trad Léon Halévy), 1860.djvu/95

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qui se trouvent présents redoublent les frayeurs de Commode. Le prince, épouvanté d’un danger qu’il reconnaît imminent, mande Cléandre en sa présence. Celui-ci n’avait encore qu’un simple soupçon qu’on eût instruit Commode des événements. Dès qu’il fut venu, l’empereur le fit saisir, et ordonna qu’on lui coupât la tête, et qu’on la portât dans Rome au bout d’une pique ; spectacle bien doux à la haine impatiente du peuple.

XLI. Les troubles s’apaisèrent aussitôt, et la lutte cessa de part et d’autre. Les soldats voyant le supplice de celui pour qui ils combattaient, craignaient le ressentiment de l’empereur ; ils reconnurent qu’on les avait trompés et qu’ils avaient agi contre la volonté du prince. Le peuple était satisfait, et se regardait comme vengé par la mort de l’homme qui avait causé tous ces désordres ; cependant il eut la cruauté de massacrer les deux fils et tous les amis de Cléandre. On traîna leurs corps dans Rome, et après avoir fait subir à ces cadavres tous les outrages imaginables, on les jeta dans des égouts : telle fut la fin de Cléandre, de sa famille et de ses créatures. La nature humaine semble avoir voulu montrer dans un seul homme qu’elle peut, au gré du plus faible souffle de la fortune, s’élever des rangs les plus obscurs au plus haut point de grandeur, pour retomber de nouveau par un caprice inattendu de la déesse.