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Page:Höffding - Histoire de la philosophie moderne.djvu/315

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plus est grande la perfection à laquelle nous passons, c’est-à-dire, plus nous participons à la nature divine. Voilà pourquoi le sage réconfortera et fortifiera son corps en mangeant et en buvant ; il aimera également les parfums, les fleurs, la musique, les vêtements pleins de goût, les exercices du corps et les spectacles. » Malgré sa veine mystique, Spinoza n’était pas un ascète. Dans sa vie comme dans sa philosophie, la tendance à se fondre en une pensée unique marchait de pair avec le sens de la réalité diverse dont la loi intérieure est justement, d’après sa conception, exprimée par cette pensée. On commet une erreur lorsqu’en caractérisant sa vie et sa philosophie on n’a pas continuellement sous les yeux les divers courants qui s’agitaient positivement en lui, bien que peut-être il n’ait pas trouvé (comme il le croyait) la parole magique qui devait satisfaire entièrement toutes ces tendances et les concilier mutuellement.

Le premier ouvrage publié par Spinoza fut un exposé de la philosophie cartésienne (1663), d’abord destiné à un jeune homme (le jeune Albert de Burgh) qu’il ne voulait pas encore initier à sa propre philosophie. Il est caractéristique qu’il ait ainsi considéré le Cartésianisme comme introduction à sa propre doctrine. Il travaillait à l’Éthique qu’il limait sans cesse. Il n’en faisait part à autrui qu’avec beaucoup de circonspection ; avant de permettre à ses disciples de montrer le manuscrit à des étrangers, il puisait des renseignements exacts sur leur caractère et leur position. C’est ainsi qu’il refusa à son ami Tschirnhausen la permission de montrer l’Éthique à Leibniz ; ce n’est qu’après des relations personnelles plus longues avec Leibniz qu’il lui montra lui-même son œuvre capitale.

D’après l’hypothèse de Tönnies59, les deux premiers livres de l’Éthique formaient un tout indépendant ; la psychologie réaliste du troisième livre, qui trahit l’influence de Hobbes, laquelle se fait également sentir dans la politique, semble n’avoir été composée que plus tard. On s’expliquerait ainsi plusieurs contradictions de forme entre le deuxième et le troisième livres. Comparée au Court traité, l’Éthique dénote un progrès. Spinoza ne conçoit plus les rapports de l’esprit avec la matière comme un rapport de causalité, mais comme un rapport d’identité. Spinoza se disposa à différentes reprises à