Aller au contenu

Page:Hall - Les trois chercheurs de pistes, 1886.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

billots d’un de ses ennemis blancs qu’il craignait et détestait.

Le cri de la pauvre Marion en voyant cet Apache hideux suffit pour alarmer le camp au-delà de la rivière, mais le sauvage y ajouta son cri d’appel qui fit traverser le ruisseau à une vingtaine de ses compagnons.

Munroe avait été retenu à la station militaire quelques heures de plus que d’ordinaire, mais il arriva qu’il se trouvait assez près de chez lui pour entendre le cri de sa femme et le signal d’appel du sauvage Apache. Le cœur du jeune homme bondit et il eut un instant le vertige, quand ces cris, aussi terribles que la mort même, vinrent frapper son oreille. Son visage bruni par le soleil devint affreusement pâle, ses dents s’entrechoquèrent, et sa figure porta en un instant l’empreinte de l’appréhension et de la douleur la plus terrible.

Il reprit bientôt son sang froid, et enfonçant les éperons dans les flancs de son cheval, il s’élança à travers les touffes d’arbres le long de la crique vers le Rio Concho et sa demeure. Comment exprimer l’émotion du jeune éclaireur qui, à l’instant où les cris des sauvages parvinrent à lui, savait déjà que sa femme et son enfant étaient perdus.

Qu’allait-il faire ?

Devait-il s’élancer à l’encontre du danger et s’exposer à être pris et livré à la torture puis à la mort ?

Il ne considérait pas le danger en ce moment : les êtres qui lui étaient chers occupaient seuls sa pensée.

Il savait bien qu’aucun indien ne se trouvait seul, loin de son camp, dans cette région du pays, et bien qu’il n’eut entendu que le cri d’un seul sauvage, il était convaincu qu’il devait y en avoir d’autres à portée d’entendre le signal. Alors le jeune homme maudit amèrement l’égoïsme qui l’avait poussé à amener sa femme sur cette frontière exposée. Il regretta profondément de n’avoir pas pris l’avis de « Vieux Rocher » et de « Chat Rampant, » son ami Caddo.