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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/14

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BEAUMARCHAIS.

tager si l’on songe qu’une éducation classique plus soignée aurait pu faire de Beaumarchais un simple homme de lettres. Seules les nécessités d’une vie aventureuse lui donnèrent et cette fougue d’imagination et cette science de l’intrigue qui font l’originalité de ses œuvres.

Ce fut dans une école de métier, établie à Alfort, que l’enfant apprit quelques éléments de latin. Souvent, il s’échappait à travers champs et courait jusqu’au couvent des Minimes de Vincennes. Là, un vieux moine lui donnait à goûter, assaisonnant le goûter d’un sermon. Et l’écolier admirait, dans la sacristie, le Jugement dernier de Jean Cousin, qu’on voit aujourd’hui au Musée du Louvre. Quarante-cinq ans plus tard, Beaumarchais se plaisait à évoquer ces souvenirs d’enfance.

Revenu dans l’atelier paternel, l’apprenti tomba amoureux. Il avait treize ans : l’âge de Chérubin ! Sa « folle amie » se maria. D’abord il voulut se tuer, puis réfléchit, ajourna son projet et écrivit enfin à ses sœurs que, malgré les perfidies de la traîtresse, il lui semblait qu’ « un compagnon d’un sexe différent ne laisserait pas de répandre des charmes dans sa vie privée. » Il ajoutait : « Moi qui devrais détester tout ce qui porte cotillon ou cornette ! Mais patience ! me voici hors de leurs pattes ; le meilleur est de n’y pas rentrer. » Ces derniers mots durent faire sourire Beaumarchais, lorsque, âgé de soixante-