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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/158

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BEAUMARCHAIS.

rectes et de néologismes de tous genres ; on ne les compte pas avec lui ». Un exégète de Beaumarchais, M. Lintilhac, a voulu les compter. Il a épluché les quatre mémoires de l’affaire Goëzman et a noté toutes les « taches » qu’un puriste y peut découvrir : elles sont nombreuses. Il n’en conclut pas moins que ces « mémoires ont leur place marquée dans tout recueil des chefs-d’œuvre de la prose française ». Au lieu de « prose », disons « éloquence » française. Beaumarchais se fût contenté d’un pareil éloge, lui qui demandait qu’on ne jugeât point « un mémoire au criminel sur les principes d’un discours académique ».

Les autres mémoires ne valent ceux de l’affaire Goëzman ni par le style, ni par la verve. Mais ils ont un mérite presque égal, si on ne considère que l’art du plaidoyer. Dans les mémoires pour la Cour d’Aix, l’ironie est déjà moins alerte et la gaîté plus forcée. Mais l’argumentation est claire, habilement ordonnée. Rien de plus souple, rien de plus vivant et à la fois de plus probant que les pages où le plaideur présente une à une les lettres autrefois échangées entre lui et Paris-Duverney et tire de ces débris de correspondance la preuve de son intimité avec le vieux financier. Dans les mémoires contre Kornman, écrits à la hâte, il semble que le polémiste vieilli ait cette fois perdu ses ressources, son esprit et son audace. Mais le talent de l’avocat n’a point fléchi.