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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/37

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SA VIE ET SES AVENTURES.

ces colères et toutes ces rancunes qui portent Beaumarchais et le poussent en avant.

Dès le premier mémoire, sa tactique se dessine. Avec une rare adresse — tout en protestant de son respect pour les magistrats — il montre que c’est devant le public et pour le public qu’il entend plaider sa cause : « Si ce mémoire, dit-il, n’a pas toute la méthode qui caractérise les ouvrages de nos orateurs du barreau, au moins il réunira le double avantage de ne contenir que des faits véritables et de fixer l’opinion flottante du public sur le fond d’une affaire dont le secret de la procédure empêchera qu’il soit jamais bien instruit par une autre voie ». Le secret de la procédure ! c’est, avec lui, le secret de la comédie. Car, dès le second mémoire, il ouvre toutes grandes les portes du greffe et fait assister son lecteur à tous les interrogatoires, à toutes les confrontations.

Fouetté par les injures et les calomnies de ses adversaires, fouetté aussi par l’applaudissement de la foule, Beaumarchais a vite abandonné le ton prudent du premier mémoire. Il sent que tous ses coups portent ; il les redouble. Au début, le ménage Goëzman était seul en scène. Mais des imprudents sont venus se jeter dans l’affaire pour y servir les intérêts du conseiller. Beaumarchais fonce sur eux. C’est un carnage. Ces ennemis que Beaumarchais eût demandés à la Providence, si leur propre sottise