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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/41

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SA VIE ET SES AVENTURES.

« C’est de l’instant, dit Beaumarchais, qu’ils ont déclaré que je n’étais plus rien, qu’il semble que chacun se soit empressé de me compter pour quelque chose. »

Malheureusement le discrédit où étaient tombés ses ennemis et ses juges n’empêchait point qu’il ne restât frappé d’une condamnation infamante. « Le public, à la vérité, écrivait Voltaire, juge en dernier ressort ; mais ses arrêts ne sont exécutés que par la langue. Le monde a beau parler, il faut obéir. » En plein triomphe, Beaumarchais dut plus d’une fois se faire cette amère réflexion : il fallait obéir. En face du sentiment populaire, les juges avaient pu renoncer à exécuter leur arrêt et Beaumarchais n’avait pas été « mandé à la Chambre, pour y être à genoux blâmé » ; mais il n’en demeurait pas moins condamné à la mort civile.

Les délais du recours en cassation s’écoulaient. Louis XV, à la fois amusé et effrayé du scandale, avait fait enjoindre au terrible plaideur d’observer le silence, et Beaumarchais ne pouvait pas impunément mécontenter le roi. Tout ce qu’il obtint, ce fut la promesse qu’une décision royale le relèverait un jour des délais imposés par la loi et lui permettrait d’arriver à la révision du procès. Pour mériter cette faveur, il offrit ses services au roi, qui les accepta. Telle fut l’origine de ses missions secrètes à l’étranger.