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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/68

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BEAUMARCHAIS.

de Figaro ! Il avait, on le voit, le droit de signer ses lettres : « Beaumarchais, le plus cruel ennemi de tout ce qu’on nomme le temps perdu ».

Achevée en 1778 et reçue à la Comédie-Française en 1781, la Folle journée ne fut jouée qu’en 1784. Durant trois années Beaumarchais lutta contre l’autorité royale et, cette fois encore, il fut victorieux grâce à sa merveilleuse habileté dans l’art de surexciter et de mener l’opinion.

Le premier censeur désigné par le lieutenant de police Lenoir conclut à l’approbation. Mais le manuscrit fut porté à Versailles ; le roi et la reine s’en firent donner lecture. Louis XVI déclara : « Cela est détestable ; cela ne sera jamais joué ». Beaumarchais connut ce veto formel. Mais il connaissait aussi la force de l’esprit public, la faiblesse du roi et la légèreté de la cour. Il ne perdit pas l’espoir de faire jouer le Mariage de Figaro.

Quand on sut que la comédie était interdite, naturellement tout le monde voulut la connaître. Pour tirer parti de cette curiosité, Beaumarchais déploya toutes les roueries et tous les manèges d’une coquette ; il promettait, refusait, puis accordait aux solliciteurs les plus haut placés la faveur d’une lecture. On se répétait le mot de Figaro, qu’il n’y a que les petits esprits qui craignent les petits écrits, et la vanité de chacun était intéressée à ne pas paraître redouter l’opuscule de Beaumarchais. L’au-