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Page:Hallays - Beaumarchais, 1897.djvu/82

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BEAUMARCHAIS.

Ce fut au milieu de ces alarmes, de ces dénonciations et de ces visites domiciliaires qu’il acheva d’écrire la Mère coupable et qu’il la fit représenter sur un théâtre nouveau, fondé au Marais. Son drame tomba ; l’heure était d’ailleurs peu favorable à la littérature dramatique.

L’avant-veille de la représentation de la Mère coupable, Beaumarchais avait été dénoncé à l’Assemblée nationale par l’ex-capucin Chabot, comme accapareur d’armes. Dans ses mémoires sur les Six Époques, il a conté tout au long cette terrible affaire qui faillit lui coûter la vie.

Il avait acquis, en Hollande, pour le compte du gouvernement français, 60 000 fusils provenant du désarmement des Pays-Bas. Le marché avait un double but : fournir des armes à nos troupes qui en manquaient et empêcher que ces fusils ne passassent aux mains des ennemis de la Révolution.

Si Beaumarchais s’était lancé dans cette entreprise, il y avait été poussé par la passion du négoce et, peut-être aussi, par le souci de l’utilité publique. Cependant, vieux, fatigué, devenu « sourd comme une urne sépulcrale », il eût peut-être suivi les conseils de son prudent ami Gudin et renoncé à l’achat des fusils hollandais, s’il n’avait redouté de devenir suspect et de passer pour un traître, en refusant l’affaire qui lui était proposée. « Il n’avait que le choix des dangers. »