Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/281

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mule célèbre le dit de l’esprit, la quantité supprimée. Il va de soi qu’il y a une hiérarchie des formes et des actes, comme il y en a une des matières et des puissances[1].

À peu près édifiés sur les notions de la matière et de la forme, nous n’avons plus qu’à revenir à la théorie des causes et à considérer la matière et la forme dans leur rôle de causes, et cela tout d’abord en tant qu’elles sont causes sous leur dénomination propre et expresse de cause matérielle et de cause formelle[2]. La forme est cause, cela va sans dire, dans les choses abstraites avant tout. Dans les choses immobiles, c’est-à-dire mathématiques, nous dit Aristote, le pourquoi se ramène enfin à la quiddité et à la définition qui l’exprime ; on trouve en dernière analyse le pourquoi de telle propriété d’une figure dans la définition du droit ou du commensurable par exemple[3]. Mais il ne faudrait pas croire que la cause formelle, proprement et expressément dite, n’ait pas son rôle en physique. D’abord il y a, parmi les sciences physiques, des sciences qui se constituent au moyen de l’introduction d’une donnée concrète au milieu de relations mathématiques[4] : telles l’astronomie, l’optique, l’acoustique ou, comme dit Aristote, l’harmonique. L’exemple d’une explication par la cause formelle, qui se présente le premier à la pensée d’Aristote au chapitre 3 du IIe livre de la Physique, est justement emprunté à l’harmonique : l’octave s’explique par sa cause tonnelle, à savoir le rapport de 2 à 1. Mais, jusque dans les sciences les plus franchement physiques, la cause formelle, et cela sous son nom propre, a sa place. Il n’y a pas de doute que les définitions des éléments en physique, de

  1. Outre le passage si connu du De an. II, 1, 412 a, 10 (τὸ δ’ εἶδος ἐντελέχεια, καὶ τοῦτο διχῶς, τὸ μὲν ὡς ἐπιστήμη, τὸ δ’ ὡς τὸ θεωρεῖν), voir Bonitz, Ind. 254 a, 14).
  2. Voir surtout Phys. II, 3 et Métaph. Α, 3 déb. et Δ, 2 ; il y a d’ailleurs presque toujours identité littérale entre ce dernier texte et celui de la Physique.
  3. Phys. II, 7, 198 a, 16 : ἢ γὰρ εἰς τὸ τί ἐστιν ἀνάγεται τὸ διὰ τί ἔσχατον ἐν τοῖς ἀκινήτοις, οἷον ἐν τοῖς μαθήμασιν (εἰς ὁρισμὸν γὰρ τοῦ εὐθέος ἢ συμμέτρου ἢ ἄλλου τινὸς ἀνάγεται ἔσχατον),…
  4. An. post. I, 27 ; 7, 75 b, 12-17 ; Phys. II déb. à 194 a, 12.