Page:Hamelin - Le Système d’Aristote.djvu/372

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grand nombre de choses sans âme. Il y a d’abord celles qui n’ont pas d’unité par elles-mêmes, celles qui ne sont que des agrégats[1] et parmi lesquelles il faut évidemment compter les choses artificielles, puisque leur unité est extrinsèque. Il y a ensuite les choses qui ont une nature. Celles-ci ont une véritable unité, et les choses qui les possèdent sont des êtres ; même, comme nous l’avons déjà remarqué ailleurs (p. 300), le principe interne qui les informe et les meut n’est pas sans analogie avec une âme. Toutefois non seulement une nature diffère de l’âme sensitive déjà consciente ; elle diffère encore de l’âme végétative dont l’action est autrement souple et compliquée. Force est donc de distinguer parmi les choses et, qui plus est, parmi les êtres terrestres, entre ce qui est animé et ce qui ne l’est pas. Cette distinction va même servir de cadre à ce qui nous reste à dire sur la théorie aristotélicienne du monde terrestre.

Les choses inanimées se divisent en deux groupes : d’une part, les éléments ou corps simples et, de l’autre, les mixtes. — Nous avons tout à l’heure indiqué la méthode dont Aristote se sert dans le De caelo pour déduire les éléments. Cette méthode s’applique, bien entendu, aux éléments terrestres comme à l’éther. Des deux mouvements simples, le circulaire et le rectiligne, le premier réclame comme sujet et caractérise l’éther. Le mouvement rectiligne requiert et sert à déterminer les autres éléments. À la différence du mouvement circulaire qui n’admet point en lui de contrariété, le mouvement rectiligne se définit par deux contraires, le haut et le bas, c’est-à-dire la périphérie de la sphère du monde et le centre de cette sphère (De caelo I, 3, 270 a, 17 ; 2, 269 a, 14 et IV, 4, 312 a, 7). Ce qui se meut vers le haut, c’est-à-dire en s’éloignant du centre, c’est le léger ; ce qui se meut vers le bas ou le centre, c’est le grave. Il y a donc dans le monde sublunaire deux éléments fondamentaux : l’un, le grave, n’est autre que la terre, qui est

  1. σωροί. Voir les textes indiqués par Bonitz, Metaph. II, 357 (ad Ζ, 16, 1040 b, 9), particulièrement Ζ, 19, 1041 b, 11 sq. ; Η, 4, 1044 a, 4 sq. ; 6, 1045 a, 8-10.