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Page:Hamelin - Le Système de Renouvier, 1927.djvu/19

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leurs éloquent, adéquat à l’importance de l’influence subie[1]. Le nom qui n’est pas prononcé sur cette page se devine aisément : c’est celui de Lequier, que M. Renouvier a appelé son maître ; nous verrons si c’est à tort.

En somme, sans parler du retentissement plus lointain que les influences ont exercé sur lui, c’est, si nous laissons de côté A. Comte, sous l’action du saint-simonisme, du cartésianisme et de Lequier que s’élabore la pensée qui va s’exprimer dans la philosophie des Manuels. Il va de soi que nous ne méconnaissons pas deux influences très réelles aussi, celles de Kant et de Hegel. Mais ces influences sont subordonnées à la première et à la troisième des précédentes. Si M. Renouvier incline déjà vers Kant, c’est avant tout parce qu’il retrouve chez lui quelque chose de la manière dont Lequier envisage la croyance. S’il parle avec enthousiasme de Hegel, c’est parce qu’il retrouve en lui et cette justification de tout ce qui a été, dont Saint-Simon avait donné

  1. « Mais il est surtout une chose que je ne dois point négliger de dire : de longs entretiens sur les questions fondamentales de la métaphysique avec un ami qu’il n’est pas temps encore de nommer, et qui en a fait depuis plusieurs années l’objet habituel de ses réflexions, ont imprimé quelquefois sur mes idées les traces des siennes… Accoutumé, comme il l’était lui-même, à donner une grande place à la croyance dans les fondements de la science, j’ai mis à profit des analyses sur la foi, sur la liberté, sur l’intervention de l’idée de liberté dans celles du savoir et de la certitude, qui sont, pour lui, le résultat d’études sérieuses et de méditations suivies et qui joueront un rôle important dans ses travaux. » Renouvier ajoute que la publication de ces travaux n’est « pas prochaine ». Lequier, né en 1814, est mort en 1862 (peut-être suicidé) sans avoir rien publié de ses essais philosophiques, d’ailleurs inachevés. En 1865, Renouvier publie des fragments de son œuvre ; l’ouvrage (La recherche d’une première vérité, fragments posthumes de Jules Lequier, Saint-Cloud, 1865, 1 vol. in-8o), est tiré à petit nombre et distribué « à quelques personnes choisies ». En 1875, Renouvier insère dans la 2e édition de la Psychologie rationnelle une courte notice sur Lequier, avec cinq fragments de la Recherche d’une première vérité (3e édition, I, 369-393 et II, 109-139). En 1897, le IVe tome de la Philosophie analytique de l’histoire donne une étude sur Lequier (Livre XIX, ch. Ier) dans laquelle il est cité comme le chef du criticisme français. Enfin en 1924, M. L. Dugas a réédité dans une édition publique les fragments posthumes édités par Renouvier (Jules Lequier (1814-1852). La Recherche d’une première vérité. Fragments posthumes recueillis par Ch. Renouvier. Notice biographique par L. Dugas, 1 vol. in-8o, Paris, A. Colin, 1924).